Emmanuel Terray, Mes anges gardiens, précédé d’Emmanuel Terray l’insurgé par Françoise Héritier

En ouverture de son livre, Emmanuel Terray nous fait une confidence : « La croyance chrétienne assigne à chacun de nous un ange gardien qui, tout au long de notre vie, nous prodigue assistance et conseil ; pour l’incroyant que je suis, quelques écrivains ont été comme autant d’anges gardiens ».

Ces Anges gardiens, on pourrait les considérer comme des garde-fous. À la seule condition d’entendre par cette expression, à l’envers du sens commun, la protection de ce qu’il y a en nous de folie, cette folie qui permet d’imaginer, de s’insurger, de rêver et d’agir.

Emmanuel Terray a choisi de nous montrer comment se fabrique une vie façonnée par des lectures.

Son point de départ : l’insurrection.

Insoumis, Terray est toujours un insurgé. C’est aussi ce qui anime chaque page de son livre : un message tonique, voire d’un pessimisme tonique, en ce début de XXIe siècle où tant de discours se complaisent dans la « réaction » plutôt que dans « l’action ».

Arrivée à ce point, dans ma propre existence, je m’interroge : s’il n’y a pas cet enthousiasme de la jeunesse, de la vie, à quoi bon vivre ? Ce que montre, à sa manière, le livre de Terray, c’est que la vérité de la vie n’est pas dans un quotidien monstrueux et désespérant. C’est dans la solidarité, la fraternité, l’action, et l’enthousiasme qu’on peut arriver à quelque chose. Même si, en fin de compte, on n’obtient pas tout ce à quoi on pourrait aspirer.

Françoise Héritier

272 p., janvier 2017 — EAN 9782021321463 
Presse (sélection) :

• Laurent Lemire, “Une vie de lectures“, Livres Hebdo, novembre 2016 : “Avec une belle liberté de ton, l’anthropologue Emmanuel Terray raconte les romans qui ont façonné sa vie. Ses anges gardiens, ce sont ses livres, et surtout les romans qui ont accompagné sa vie. Nous les connaissons presque tous : La condition humaine, Le sang noir, Le rivage des Syrtes, Voyage au bout de la nuit, Le château, etc. Et pourtant, avec lui, nous les redécouvrons. Malraux, Guilloux, Gracq, Céline, Kafka, Broch, Loti, Balzac font partie des quinze étapes qui jalonnent cet itinéraire intime. Le plus étonnant dans ce panthéon est la figure de Barrès, sa réputation d’égotiste et de nationaliste paraissant peu compatible avec les prises de position d’un intellectuel engagé à gauche. Mais cet anthropologue, ancien directeur d’études à l’EHESS, qui a exploré les domaines de la politique, de la loi, de la liberté, de la démocratie et de la violence a un principe : il refuse les préjugés. Il relit donc La colline inspirée comme une sorte de grand délire emporté par sa propre liberté. “C’est la répression déchaînée au nom de l’ordre et de la discipline qui, chassant les enthousiastes du monde réel et de la société, les enferme, d’abord dans le rêve, puis dans le délire de la folie.” (…)”

• Michel Plon, “Le révolté fraternel“, En attendant Nadeau, avril 2017 : “« Vérité et vie, donc, et non raison et joie ». Cette ultime devise <de Miguel de Unamuno>, on sent que Terray la fait sienne, tout comme il adhère à celles de ces autres « anges gardiens » qui lui font cortège, de Pierre Loti à Saint-John Perse en passant par Kafka, et dont la lecture peut nous aider à lutter contre le découragement et l’abandon des valeurs de lutte auxquels notre époque ne cesse de s’efforcer de nous faire renoncer.”